Le Magasin d'images de fleurs

La photographie à la capacité de nous fait croire qu’il s’agit du réel.Elle crée une distanciation du simple usage de l’appareil photographique autant que l’Histoire crée une distance avec le réel. C’est un va-et-vient perpétuel entre la surface de l’image et l’instant de l’image. Et les récits s’inscrivent dans l’Histoire, de fait. C’est en créant un récit autour de l’image et de la vente de cette image qu’il m’est possible de redonner à la voix sa caractéristique première, être audible. De plus, la voix porte l’archive du langage, en même temps que la plénitude de la présence. Il n’y a pas de distinction entre la photographie, le texte, la mise en voix et le mouvement. Je conçois ces ensembles de matériaux comme un grand tissage, terme qui dans son étymologie donne le mot texte, et dans une perspective de décloisonnement. Donner à voir et à entendre un instant d’une réalité possible. Via des éléments fixes, conçus comme des supports (la photographie objet, les mots d’un texte, un corps, une architecture etc.), les regards tendent vers le mouvement et la mobilité tant dans les déplacements que dans les idées. C’est d’ailleurs à cet endroit que le Magasin d’images de fleurs prend sa racine. Il présente des images de bouquets de fleurs, mais pas seulement, il aborde des questions d’économie, mais pas uniquement. Car, à mon sens, la représentation d’un objet ou d’une expérience ou de n’importe quel élément sensible ou sensoriel est le fondement de l’histoire de l’art, puisqu’un déplacement d’un instant de réalité s’opère vers un autre support que la carte mentale où ce ressenti a été conçu. D’un point de vue plus pragmatique, le magasin base ses fondements dans un contexte précis : celui d’une époque de l’ultra-diffusion des images et des informations, d’un démantèlement des idéaux politiques, économiques et sociaux. Le monde de l’entreprise gagne peu à peu du terrain camouflant un libéralisme désinhibé qui confine les esprits dans un schéma capitaliste qui prône des valeurs de corporate, de coworking et d’un « tout va bien ». Bref, cloisonnement généralisé. Le Magasin n’est pas une pommade, ni un remède, mais une proposition d’un possible.

photographie encollée sur plaque en verre // 56x84cm // 2018





photographie encollée sur mélaminé // 2018

 

 

 

 

 

papier peint dos bleu, bande peinture rouge // 2018

6 chaises de bureaux, photographie contrecollée sur aluminium, poste audio, éditions // 2018

©Sandrine Binoux